LA CARCINOSE PERITONEALE

Publié le par docteur mailler

La carcinose péritonéale (CP) est l’atteinte du péritoine par une tumeur maligne d’origine extra-péritonéale.

 

Elle s’accompagne ou non de métastases ganglionnaires et/ou viscérales. La présence d’une CP témoigne d’une maladie néoplasique évoluée et est habituellement associée à un mauvais pronostic avec une médiane de survie de 6 mois.

 

La CP est cependant une entité hétérogène qui regroupe des affections dont le pronostic dépend de la tumeur d’origine.

 

Le pronostic des CP d’origine colo-rectale ou ovarienne est nettement meilleur que celui des CP d’origine gastrique ou pancréatique. Les deux tiers des CP sont d’origine digestive, dont plus de la moitié sont d’origine colo-rectale, 20% d’origine gastrique et 20% d’origine pancréatique. Un tiers des CP est d’origine non digestive dont plus de la moitié est d’origine ovarienne.

 

Le traitement standard actuel des CP repose sur la chimiothérapie systémique. Certains cas sélectionnés bénéficient d’approches thérapeutiques multimodales plus agressives comme la chimiothérapie intra-péritonéale post-opératoire immédiate ou la chimio-hyperthermie intra-péritonéale .

 

 

L’ASCITE

 

La CP est parfois responsable de la formation d’une ascite.

 

Au plan physiopathologique, le mécanisme de survenue de l’ascite est la conséquence de plusieurs facteurs dont les 2 principaux sont l’obstruction tumorale lymphatique et l’augmentation de la perméabilité vasculaire à l’albumine.

Plus rarement, en cas de métastases hépatiques diffuses associées à la CP, l’ascite est la conséquence de l’hypertension portale comme dans la cirrhose.

 

Les symptômes liés à l’ascite sont grossièrement proportionnels à son volume. Il peut s’agir d’une simple gêne avec distension abdominale ou d’une véritable douleur. Une ascite très abondante peut provoque une dyspnée et orthopnée.

 

L’ascite ne doit être traitée que lorsqu’elle est symptomatique.

 

Plusieurs traitements ont été proposés pour assécher l’ascite de la CP. La plupart se sont avérés inefficaces ou ont été abandonnés: isotopes radioactifs intra-péritonéaux tels le P32, l’ immunothérapie intra-péritonéale par des antigènes bactériens ou de shunts péritonéo-veineux . De nouvelles approches pharmacologiques intra-péritonéales sont en cours d’évaluation: interféron, TNF-alpha, anti VEGF, inhibiteurs des métalloprotéinases.

 

La restriction sodée et le traitement diurétique, principalement par spironolactone, permettent le contrôle de l’ascite en cas de métastases hépatiques diffuses. Ce traitement n’est, a priori, pas efficace en cas de CP isolée. Dans ce cas, seules les ponctions d’ascite itératives permettent de soulager les patients.

En cas de CP diffuse, un guidage échographique peut s’avérer nécessaire. Les ponctions de gros volumes (5 à 10 litres) permettent de soulager rapidement le patient et de réduire la durée d’hospitalisation. Elles peuvent cependant se compliquer d’hypovolémie, d’insuffisance rénale et d’hyponatrémie. De plus, les ponctions itératives conduisent à une déplétion protéique et risquent d’aggraver la dénutrition. La perfusion systématique d’albumine (6 à 8 g par litre d’ascite évacuée) permettrait probablement de limiter les effets délétères des ponctions chez les patients dont la durée de vie prévisible est supérieure à 3 mois. Certains ont proposé de laisser un cathéter intrapéritonéal en place pour permettre d’évacuer périodiquement l’ascite à domicile, ce qui permet d’éviter les hospitalisations itératives pour ponctions mais fait courir un risque infectieux.

 

 

L’OCCLUSION

 

La survenue d’une occlusion chez un patient ayant des antécédents de cancer n’est pas synonyme d’occlusion néoplasique.

Une cause non tumorale (bride, volvulus, entérite radique...) ou une lésion facilement résécable sont responsables d’ occlusion dans 15% à 30% des cas.

 

Le scanner est l’examen de choix chez un patient en occlusion dans un contexte de

CP. Il permet le diagnostic d’occlusion, le diagnostic du siège et de la nature de l’obstacle. Les explorations radiologiques, lavement opaque et/ou transit du grêle, sont particulièrement utiles en cas d’occlusion incomplète, d’occlusion colique ou d’occlusion grêle proximale.

 

Le traitement peut être soit chirurgical (en cas de geste simple, si l’état général le permet) soit médical.

Les malades ayant une ascite ou une CP diffuse ne doivent probablement pas être opérés .

Ces occlusions sont rarement des urgences et laissent habituellement le temps d’informer le patient et sa famille et de discuter des options thérapeutiques avec eux.

 

 

NUTRITION / APPORT HYDRIQUE

 

En fin de vie, la sensation de faim est inconstante et la prise alimentaire est réduite. L’objectif du maintien de l’alimentation orale est le plaisir et le confort du patient, plus que l’apport nutritionnel. Malgré l’occlusion, avec un traitement symptomatique bien conduit, la plupart des patients peuvent boire et manger de petites quantités d’aliments sans résidus. Ceux-ci sont absorbés dans la partie proximale du tube digestif et permettent un apport calorique

suffisant qui rend inutile un complément parentéral.

 

La nutrition parentérale n’est indiquée que chez un petit nombre de patients jeunes, en bon état général, dont la durée de survie prévisible est supérieure à 3 mois .

 

Les besoins hydriques sont très réduits en fin de vie et 500 ml à un litre par jour suffisent généralement pour contrôler les symptômes. L’hydratation parentérale ne prolonge pas la survie, mais accentue les problèmes de rétention, de sécrétions bronchiques et les besoins d’aspiration. De plus, l’intensité de la soif et de la sécheresse de bouche n’est pas influencée par le volume d’hydratation orale ou parentérale. La sécheresse de bouche est contrôlée par la boisson, par l’utilisation de petits moyens comme des glaçons à sucer ou des morceaux d’ananas, et surtout par la réalisation systématique et fréquente, idéalement toutes les deux heures, de soins de bouche avec une solution de bicarbonate de sodium à 14 ‰ .

 

 

CONTROLE DE LA DOULEUR

 

Le contrôle de la douleur dans un contexte d’occlusion sur CP suit les règles habituelles de conduite des traitements antalgiques: évaluation régulière, prescription à intervalles réguliers et non «à la demande», paliers OMS etc.

 

La morphine n’est pas contre indiquée en cas d’occlusion.

Le Scoburen® ampoules à 20 mg est l’antispasmodique de choix. La dose initiale est de 60 mg par jour et la posologie est progressivement augmentée jusqu’à 380 mg par jour si besoin

 

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CONTROLE DES NAUSEES ET VOMISSEMENTS

 

Certains facteurs associés  peuvent exacerber les nausées et vomissements : hypercalcémie, insuffisance rénale, ascite importante, infection, hypertension intra-crânienne, douleur, anxiété...

Le choix d’un antiémétique est difficile. L’association de plusieurs molécules aux modes d’action différents est souvent plus efficace que l’utilisation d’un seul produit.

 

Les molécules les plus intéressantes sont l’Haldol  le Nozinan, Scoburen,  et le Primpéran.  Quels que soient les médicaments utilisés, le contrôle des vomissements est obtenu dans 80 à 89% des cas.

 

Le Primpéran  stimule la motricité gastrique et intestinale. Il faut éviter cette molécule en cas d’occlusion complète car elle risque d’induire des coliques intestinales et de majorer les nausées et vomissements.

 

En seconde intention, le contrôle des vomissements par la Sandostatine est satisfaisant ou complet dans 75% à 100% des cas. Elle permet l’ablation de la sonde naso-gastrique chez 2 patients sur 3. Elle peut être utilisée seule ou en association avec le traitement antiémétique

Conventionnel.

 

AUTRES TRAITEMENTS UTILES

 

La ranitidine qui peut être administrée par voie intramusculaire, elle réduit le volume de la sécrétion gastrique comme les inhibiteurs de la pompe à protons.

 

Les corticoïdes à titre de test thérapeutique de courte durée (5 jours) à la dose de 6 à 16 mg par jour de dexaméthasone par exemple peut accélérer la résolution de l’occlusion et apporter un certain bien être général sans trop d’ effet délétère.

 

En cas d’occlusion incomplète, les laxatifs peuvent être utiles en cas d’obstacle colique ou rectal. Forlax, Movicol, l’huile de paraffine sont des laxatifs recommandés.

 

 

L’ASPIRATION NASO-GASTRIQUE

 

L’aspiration naso-gastrique est source d’un inconfort important et d’un certain nombre de complications. Elle ne doit donc être utilisée que pour de courtes durées, inférieures à 3 jours, dans deux situations:

1) lors de l’installation de l’occlusion. Elle entraîne la levée de l’occlusion dans moins de 20% des cas..

2) lorsque l’occlusion est installée, en cas d’échec du contrôle médicamenteux

des symptômes, dans l’attente de la réalisation rapide d’une gastrostomie de décharge.

 

 

LA CHIRURGIE

 

Gastrostomie et jéjunostomie de décharge sont des gestes  de dernier recours qui permettent d’éviter l’inconfort de l’aspiration naso-gastrique.

 

Avec la gastrostomie, la plupart des patients peuvent ingérer des boissons et autres aliments mixés. La sonde de gastrostomie est clampée pendant les repas et reste clampée après les repas aussi longtemps que le patient le tolère. Lorsque les symptômes réapparaissent la sonde est déclampée, mise en décharge par simple gravité sur un sac, sans aspiration

Publié dans gastroentérologie

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